César Vayssié
Spectacles
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Différentes temporalités se croisent, des séquences longues et des plans à la limite du subliminal. Comment avez-vous conçu le montage ?
J’ai toujours ce fantasme d’un cinéma brut, indicible et désinvolte, fondé sur des sensations temporelles et esthétiques plutôt que sur une logique narrative. Le film repose sur une recherche dramaturgique très élaborée en amont mais dont l’évidence est bouleversée au tournage et par le travail de montage avec lequel je ré-écris le film sans complexe, en tordant les choses, en assumant les contradictions et ce qui surgit à côté du projet initial. Donc, d’une certaine manière, rien n’est imprévu.
Que représente Ludwig Van Beethoven, souvent cité, dans Ricorda ti che è un film comico?
Beethoven est un artiste totalement en décalage avec les désirs musicaux de la jeunesse contemporaine. Cet anachronisme évoque la complexité de la relation avec les tutelles historiques, le passé et la permanence des affres existentielles. En l’occurrence, la force de Beethoven face à sa surdité. Faire de la musique sans l’entendre malgré tout. Exemple naïf mais symbolique d’un élan qui avance face à l’impossible. À l’époque, on parlait de courage héroïque, aujourd’hui on parle de résilience. Au choix.
Comment avez-vous envisagé la création sonore et la musique justement ?
Le travail de l’image et celui du son sont dissociés. Il n’y a pas de prise de son au tournage. La parole est enregistrée en amont du tournage. La musique travaille dans la sens d’une opposition à la musique savante de Beethoven. Elle a été créée par moi-même sous le pseudonyme GROUPEDEROCK avec des outils numériques élémentaires qui produisent de petites pièces électroniques pop bricolées, au son contemporain, qui réarrangent parfois des poncifs de Beethoven.
Ricorda ti che è un film comico emprunte son titre à une citation de Federico Fellini, « Souviens-toi que c’est un film comique. ». Comment avez-vous abordé cette devise ?
Fellini était en dépression pendant le tournage de Otto e mezzo, il avait écrit cette phrase sur un sparadrap collé à la caméra du tournage, comme pour conjurer la crainte de produire un film trop sinistre. Le film est cependant un chef-d’œuvre qui transpire l’angoisse existentielle. D’une manière plus conceptuelle, l’aberration sémantique – souviens-toi que c’est – souligne le schisme entre le vivant et le filmé. Cela correspond à la double dimension du film.
Marseille, juin 2023
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